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Adaptation et innovation RH face aux mutations économiques et technologiques

Utilisation de l’intelligence artificielle, implication dans la transition écologique, sauts technologiques sectoriels… Les mutations économiques, technologiques ou écologiques impactent le secteur des ressources humaines. Pour faire face à ces évolutions de fond, les entreprises doivent s’adapter pour rester compétitives. Voici quelques pistes de réflexion.

Alors que l’année 2024 a vu la vague de l’intelligence artificielle générative déferler sur le monde du travail, à travers la démocratisation d’outils comme ChatGPT, les entreprises doivent s’adapter et se former aux nouvelles pratiques et compétences pour rester ouvertes aux implications de cette évolution technologique. Bien entendu, l’exemple de l’IA ne touche pas tous les métiers, mais elle peut toucher les services marketing, communication, ressources humaines et administratifs de tous les secteurs.« L’IA générative pourrait se diffuser dans les fonctions supports de toute entreprise quelle que soit son activité, anticipe Jean-Charles Rongère, directeur général de Cross Data, entreprise angevine qui travaille avec l’IA depuis 2019. Selon les besoins, les dirigeants et les managers peuvent être formés en priorité afin d’identifier comment gagner en efficacité grâce à cet outil. »

Les compétences spécifiques de Cross Data en modélisatio nmathématique et algorithmique lui permettent aujourd’hui de proposer une offr ede conseil pour la mise en œuvre de l’IA dans les entreprises. Depuis le début de 2024, la demande est exponentielle, à tel point qu’il lui a fallu recruter sept nouveaux collaborateurs au cours de l’année. « On est passés d’un monde sceptique sur l’idée de l’utilisation de l’IA comme levier de performance à un véritable enthousiasme. Aujourd’hui, le besoin d’acculturation et de formation à l’IA est important. Nous travaillons avec des entreprises de tous les milieux, à l’image de Néolithe dans le traitement des déchets, de Graines Voltz dans le secteur de l’horticulture ou encore BPI France. Elles nous demandent de les accompagner à mettre en place des stratégies… » L’espoir ? Gagner en efficacité et en performance sur des tâches automatisables et récurrentes, comme la rédaction de compte-rendu ou la génération de devis à partir de notes.« Après une formation d’une journée avec mes collègues, j’ai pu gagner 30minutes par devis, ce qui me permet d’économiser 50 heures dans mon année et de les allouer à d’autres tâches plus qualifiées », témoigne Jean-Charles Rongère.

 Embarquer toute une équipe

Comme pour toute évolution technologique, Bruno Rollin, dirigeant du cabinet de recrutement Lucy & Co fondé à Angers en 2011, recommande à ses clients de faire en sorte d’embarquer au maximum l’ensemble des salariés.« La technologie a toujours influencé les métiers, que ce soit l’arrivée du tracteur pour les agriculteurs ou celle des ordinateurs dans tous les secteurs. À chaque fois, des métiers disparaissent, d’autres s’adaptent et évoluent. On sait que l’IA va impacter les métiers, mais il est difficile d’en anticiper les implications pour le moment. Donc l’important est d’embarquer ses équipes, d’encourager le test d’outils et d’applications et de faire des points réguliers sur ce que l’on souhaite utiliser et pourquoi on en a besoin. »Le spécialiste des ressources humaines travaille par exemple avec l’entreprise ICEDAP, qui propose des formations en ligne sur-mesure à ses clients. « L’IA aura sans doute un impact dans la rédaction, le graphisme ou le montage vidéo qui constituent une grande partie du travail actuel des salariés. Pour anticiper une potentielle transformation des métiers, il faut travailler en intelligence collective avec l’équipe : c’est la meilleure façon d’accompagner le changement et de le rendre efficace et acceptable par tous. » C’est aussi le constat de Jean-Charles Rongère : « Selonnotre expérience, le succès de l’intégration de l’IA dans l’entreprise passepar trois étapes : acculturer afin que chacun soit au courant de ce que l’IApeut faire ou non, adapter l’intégration de l’IA aux usages concrets enco-construction avec les utilisateurs et former aux outils. »

 Établir une véritable stratégie RH

Pour s’assurer de ne pas rater le train des grandes évolutions, qu’elles soient technologiques ou environnementales, les ressources RH avec les bonnes compétences répondant aux besoins de l’entreprise peuvent se trouver en interne comme en externe. La montée en compétence des équipes, sur l’IA comme sur d’autres enjeux, a un double intérêt : celui de conserver la compétitivité et l’attractivité de l’entreprise et celui de faire évoluer et retenir les collaborateurs. « Pour cela, il faut faire un travail de définition fine du projet d’entreprise et de la stratégie pour y parvenir, conseille Bruno Rollin. Lire son environnement, déterminer son évolution, s’organiser pour y parvenir en définissant ses besoins futurs, y compris en RH… Avoir en tête ces intentions stratégiques permet aussi aux salariés de se projeter et parfois même de faire des propositions. »

Définir cette stratégie et les besoins RH qui en découlent est précisément la fonction de François Deltour, conseiller ressources humaines entreprises à la CCI de Maine-et-Loire. « J’accompagne, pendant deux à dix jours directement au sein des entreprises, un diagnostic entreprise et ressources humaines avec la mise en place d’un plan d’actions, de suivi et d’outils »,explique-t-il. Ainsi, les dirigeants et les responsables RH peuvent par exemple établir une GEPP, une gestion des emplois et des parcours professionnels. Ce plan macroéconomique des compétences au sein de la structure permet de cibler les besoins en formation et en recrutement en fonction de la direction que souhaite prendre l’entreprise. « Par exemple, dans une entreprise de peinture de façade, on a établi un plan de passage à des techniques de projection de peinture, qui remplace en partie l’application au rouleau. Il faut accompagner les équipes à ce changement en travaillant sur la formation et les conditions de travail pour assurer une continuité de la qualité finale. »

 L’intérêt de la formation continue

Quelle que soit la taille de l’entreprise, la formation continue est donc l’un des outils qui permet de s’adapter à la conjoncture et aux évolutions socio-économiques. C’est la stratégie choisie par VandB. L’entreprise, dont le siège social se trouve en Mayenne, franchise des magasins spécialisés dans la vente et la dégustation de vins, de bières et de spiritueux. « En 2024, j’ai travaillé avec la holding sur un plan de développement des compétences, indique Angelina Peltier, coordinatrice Emploi & Compétences au sein de la direction Formation de la CCI 49. En analysant la stratégie d’entreprise à venir, nous avons a identifié les besoins en formation et les salariés concernés. » Par exemple, VandB concept qui conçoit et réalise l’agencement des magasins franchisés a fait évoluer ses techniques : « Une machine programmable va désormais peindre certains éléments. Le métier évolue pour les peintres : il faut donc qu’ils se forment à l’utilisation de la machine à commandes numériques, aux réglages et à la maintenance. » De la même façon, lors de l’ouverture d’un nouveau magasin, les directeurs désormais en charge de la remontée d’information paye de leurs employés ne sont pas toujours formés. « C’est pourquoi nous avons mis en place des Actions de Formation en Situation de Travail : ce sont des pairs qui forment leurs collègues et partagent leurs connaissances des spécificités de fonctionnement de l’entreprise. Droit du travail, convention collective, arrêt maladie, congés, heures complémentaires et supplémentaires… Toutes ces notions de base sont ainsi abordées au prisme des réalités vécues au sein de l’entreprise. » Certains iront jusqu’au diplôme suite à ces formations par les pairs, en faisant valoir leurs nouvelles compétences pour une validation des acquis de l’expérience (VAE). Un plus pour les salariés, dont la carrière peut ainsi évoluer au sein ou hors de l’entreprise.

La montée en compétence en interne est aussi le choix fait chez Com’inject-49, qui fait de l’injection plastique à Brissac et emploie 26salariés : Benoit Clavreuil, responsable de l’usine, a choisi de passer la main à sa responsable commerciale. Pour organiser un passage fluide des responsabilités, Angelina Peltier l’a accompagné dans la définition d’un parcours de transfert de compétences avec tutorat et formation interne pour Cécilia Leroi, sa remplaçante.

 Recrutement : s’adapter pour attirer

En parallèle de ces plans de formation, il convient d’anticiper les recrutements en fonction des évolutions futures de son secteur. « Il émerge toujours de nouveaux métiers avec de nouveaux outils technologiques et de nouvelles compétences, pointe Bruno Rollin. On le voit sur l’IA par exemple, mais aussi sur l’écologie ou les économies d’énergie… Cela peut valoir le coup d’aller chercher ces compétences directement en recrutant des personnes déjà formées. » Or, le marché de l’emploi est extrêmement tendu en Maine-et-Loire. Avec 6,4 % de chômage, les recrutements font parfois figures de véritables défis. Les entreprises doivent donc adapter leurs stratégies pour conserver leur attractivité. « Ce sont les personnes recrutées qui ont le choix entre plusieurs entreprises et plus l’inverse, reprend le spécialiste. Les dirigeants doivent donc faire preuve d’inventivité pour se vendre au mieux. »

François Deltour partage ce point de vue : « La marque employeur est un vrai enjeu : à la fois en interne pour que les salariés évoluent au sein de l’entreprise et aient envie de rester, mais aussi en externe. Valoriser les collaborateurs et les métiers, montrer que l’entreprise peut être passionnante, donner du sens au travail sont des éléments aujourd’hui nécessaires pour attirer les candidats. » Les deux professionnels évoquent un rapport au travail qui évolue avec les jeunes générations. « On voit des candidats qui refusent des postes, même s’ils n’ont pas d’autre offre, note Bruno Rollin. L’impact du projet d’entreprise est indéniable, tout comme ceuxd es conditions de travail et de l’engagement RSE auxquels sont attentifs les postulants. »

 Cultiver la souplesse

Selon les résultats d’une enquête de l’institut de sondage Ipsos, publiée en juin 2024, les dirigeants d’entreprise font part de réelles difficultés à comprendre la génération Z, celles des moins de trente ans. Perçus comme « moins investis », « moins fidèles à l’entreprise »et « moins prêts que [leurs] aînés à sacrifier [leur] équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle au profit du travail », les représentants de cette génération sont mal compris. Ce qui, selon l’analyse d’Ipsos, s’accompagne de problèmes de recrutement, nourris par cette incompréhension mutuelle : « La majorité des dirigeants s’estime confrontée à des difficultés pour recruter et fidéliser des jeunes salariés. » En miroir,« seuls 56 % des 18-28 ans pensent que les entreprises donnent envie aux jeunes de les rejoindre », sachant que « l’équilibre entre la vie privée et la vie professionnelle reste le premier critère pour choisir de rejoindre une entreprise, 80 % des 18-28 ans estimant que c’est primordial ou important, suivi de l’ambiance de travail (80%). »

 Bruno Rollin constate ces difficultés sur le terrain avec ses clients. « Le rapport au travail est effectivement différent. Pour les recruteurs, le défi est double : à la fois de laisser de la souplesse en répondant par exemple à la forte demande de télétravail, tout en cultivant au maximum l’intégration et l’esprit d’équipe qui permettront de retenir les nouveaux embauchés. » Un programme qui complique le management. « Sur le télétravail, de mon point de vue, il est illusoire de vouloir établir des règles similaires pour tous : il faut travailler en confiance et adapter le cadre en fonction de l’autonomie de personnes et du poste. » Une chose est sûre, il y a tout intérêt à trouver des terrains d’entente, car le marché de l’emploi ne cessera pas d’évoluer, ni d’impacter le secteur des ressources humaines.

 Article écrit par Juliette Cottin (ANJOU ECO - n°78 - Février 2025)

Crédit photo : shutterstock_2433207433 RH

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